TRAIN ET TARTINES 


Feurst classe.
Le vapeur trace.

Molasses,
toutes ces heures folasses,
Gloutonnes, de cocos et réglisses
des Etats, des Pays passent
classe max, cotonne
cabines, espaces,
gloutonnes de barres mars, glaces
Skaille, ice...

Drinks, straps,
danse d'hotesse sur tapis perses
les fastes de l'Orient
Express,
Maintenant me lassent.

Je pense, tes paumes lisses
polissonnes
posées, caressent
mes joues frissonnes
tes pupilles noisettes
laissent en moi, nets,
des signaux de détresse...

le train s'entraine
spide, vitesse,
et moi : prélasse.

Le pays passe,
De prés en plaines,
plaines en vallées,
s'annonce
l'haleine dense, halée
de l'océan salé.

Je l'observe...et
Soudain,
L'Express déraille, et file
Sur l'allée,
bleue, d'un courant sous-marin,
dallée de coraux et d'embruns, attention !
Je tire la sonnette d'alarme !

Le piston du klaxonne brame
Comme un cerf aux aguets. Arrêt.
Au loin, un récif dessine
Le nom de la station : Nous sommes à Onirine.

Et là, elle apparaît.
Assise sur la banquette satine
Coquette, gracile, c'est une ondine.

Galopine, Oh ! Oui, Ca, c'est ma go coquine,
Copine nippone, taquine, friponne,
indienne, hindoue, licorne des maquis
Bretonne brune, bigoudine rubis,
Elle rugit, gronde, ouh !
Fait le dos rond !
La voilà qui bondit !
Puis qui se pelotonne,
Tout aussi lionne
Que Rondoudou ! Femme-bandit !

Casquée de perles fines, et capée d'un boubou
Campée dans des bottines en velourouge
Parée de popeline et plumoranges
du Nandou de Darwin,

Assise, sage, dans ma loge orpheline,
Coquette, gracile, c'est une elfe féline.

Narquoise, elle a, tamisée sur ses joues
Une poudre de rire,
couleur turquoise, rose-acajou.

Sept jours se passent en jeux,
joies et chants,... Le matin,
Je lui fait des tartines
d'amour et de chocolatine,

Et le soir, alors qu'au couchant
le soleil s'incline,
Ses longs cheveux défaits,
Déposent leur ambre fine
sur mes genoux.
Je lui lis des comptines...
Elle ronronne, c'est doux.

Dans ses sommes elle chaudronne,
Mélange l'huile framboise
comme moto-vidange, môme ange.
Gorgonne,
Elle tout-truande, des pirates aux tortues comme tetue brigande !
Bang !

Et Xsang ! Bruit de salpêtre !
Les rails crissent,
lianes qui cassent,
L'Express freine,
je m'éveille en sursaut.
à perte de vue
ce n'est plus que campagne champêtre,
champs de chous, maillés
de cabanes à cerceaux de pailles et de chaumes,
berceau de l'amazone
qui prit mon coeur d'assaut.

Je me détends.
Ma pipe se sent libre,
des gouttes d'air, cuites,
pépitent,
et les fleurs d'oseilles
qui se consument
dans ma pipe, vibrent sans feu.

Cents fanaux se fanent à l'affu
des platanes.
Savane bretonne et plants de laitue.
Plages butanes, dolmen,
canaux, pollen brut, butin
des abeilles mutines.

On arrive.
Je ferme mon livre : Ubu.

Terde ! Putain !
Le bouquin m'a mordu !

Et je dis Merdre !

Mon trip tribu, délire zébu,
Mon afrique baloche,
zippe et trébuche,
La locomoche
freine, Franche en approche.

J'éteins ma pipe
Reviens à la réalité.
La vitre démontée montre des types,
Des mirettes et trombines :
L'humanité, quai de têtes
inquiètes, visites escomptées.

Framboise, y es-tu ?
Iroquoise ! T'y caches-tu ?
Diane secrète des forêts de Merline !

La locote s'arrète.
s'accoste,
s'arrime.
La gare débute.
Mes spots sculptent
la foule drue, compacte.
Mon regard scrute
le faces inertes, obtues,
je périscope, stop. Te voilà.
Tes yeux noisettes
et nutella
précipitent l'impact.

Nos corps se téléscopent
Mémoires éclatent
Soutes se vident,
Larmes mazout.
Eclipse, plus que toi dans le ciel cyclope.

J'ouvre ma capeline,
Te presse,
Et t'enveloppe,
Dans mes bras tu te nougatines

Et, alors que part l'Express
vers des rives voisines

tes lèvres me tartinent
d'amour,
et de chocolatine.