Tu m'apprends à glaner les rires
voleur de pèches

à me taire
à parler
à pleurer les colombes qui découvrent la Terre

chaque matin
j'aimerai seulement être une oubliette
une carpe muette
de joie

un lendemain de fête

un banquet dévasté dans les débris de nappes
là, sous un arbre, un accordéon fendu

un piano dézingué :

ce type, chemise ouverte
étalé, dort dessus

les musiciens sont là, endormis dans les herbes

le soleil
levant, accentue le contraste
les bouteilles vides projettent des ombres en gerbes

partout, des grappes de raisin
éclatées
des kiwis ecrasés
des gâteaux et des tartes empilées
parmi les verres brisés

trois parasols
déchirés gisent sur une table
renversée

    la plupart des convives
imbibés de vin doux
et de liqueur de rose

par couples
ou en trio parsèment tout le champ
ils rêvent
            d'autre chose

et moi    avec cet étau qui m'enserre le crâne
comme première sensation

    je me réveille, tatonne
chancelle
    glane une pomme
    croque un bretzel
et enfin
redressé

dominant toute cette apocalypse
cette débacle endormie
   
    je me sens
    naif, fier, étonné

nouveau-né