Lethé

Par une nuit glacée
Sous la voute stellaire
Alors que méditant, j'allais, léger
Mon chemin, sur la Terre,
De l'espace infini, dans un éclair doré
Tomba la couturière
Des dieux, de vif argent nimbée

Je l'entends murmurer :
"Petit frêre,
Bientôt vers des contrées
Glaciales,
En solitaire
Trop proche des enfers
Tes pas vont te mener...
Laisse moi t'enseigner
A coudre, à repriser
La laine d'univers
Et le coton d'Eté
Apprends, mon petit frêre,
Les Passes Elémentaires..."

Souriant, je m'incline à ses pieds.
"Je t'écoute, ô ma mère,
et mes mains sont levées
Pour t'obéir et faire
Pour coudre, ou repriser
Les colliers de Cerbère,
Ou les plaies de Médée !"

Cette nuit là dura l'éternité.

Lorsque l'aube paru, flottaient encore dans l'air
Ces quelques mots planaires :

"Et maintenant, ô mon jeune initié
Aux coutures sacrées
Jette vers les nuées
Comme le discobole, ton âme circulaire !

La haut tu tisseras les étoiles filaires,
Toutes en fibres d'éther
Saturées de lumière
En habit de poussière galactée !

Alors, mon petit frêre,
Tu pourras t'enfoncer
Au profond de la Terre,
Traverser ton Lethé..."