A L I C E

Déesse des lys,
A l'aube, Alice
Enrobe son corps
D'un pétale pelisse
En pagne amidonné
Doublée d'os et de cuir,
Doublée d'os et d'henné.

Alors,
Alice sort, tigresse illuminée, sur la piste sablée,
Ordonner
Aux fauves de la nuit de fuir, de fuir et d'oublier.

Déesse délice
A midi, Alice
Joue les mamans gentille
Amadoue le maïs
Et rougit de piment
De gingembre et d'anis
Les joues des aubergines,
Les cous des aubergistes...

Alors,
Alice sort, tigresse en tablier, sur la piste sablée
Donner
A manger son mafé aux douze régiments des anges affammés
Aux douze armées des diables à marner son café.

Le soir, déesse
Lasse, Alice
Lave ses courbes noires,
Lisses et galbées
Aux deux sources d'eau pure,
Saillies du Jujubier,
Jaillies du Tulipier...alors,

Alice,
Un génie se débusque hors de l'ombre arborée, 
Et parfume
La forêt de tes charmes d'une averse d'agrumes 
Et ta fourrure d'arômes aux goyaves et vanilles

Enfin, la nuit s'habille...
Alice, déesse
maritime, délie ses tresses
coralines et se livre,
tigresse docile
Au sommeil
à l'ivresse facile...Et alors,

Alors qu'Alice sort sur la piste des rêves
En silence,
Je me glisse
jusqu'au bout
de ses lêvres
au gout musqué
de fraise et de lys
et vole à ma déesse
un unique baiser
au goût risqué
de rose et de délices.